
Les États-Unis et la Chine ont annoncé lundi suspendre pour 90 jours, d’ici le 14 mai, la majeure partie des droits de douane prohibitifs qu’ils s’étaient mutuellement imposés. Washington et Pékin cherchent à mettre fin à une guerre commerciale qui a perturbé l’économie mondiale et mis les marchés financiers à rude épreuve.
Trêve entre Washington et Pékin. Les États-Unis et la Chine ont annoncé, lundi 12 mai, la suspension pour 90 jours de la majeure partie des droits de douane prohibitifs qu’ils s’étaient mutuellement imposés, marquant une désescalade dans leur guerre commerciale qui a ébranlé l’économie mondiale.
Cette suspension prendra effet « d’ici le 14 mai », ont annoncé les deux plus grandes puissances économiques mondiales dans un communiqué commun publié après deux jours de négociations à Genève, scrutées par le monde entier.
Concrètement, les deux camps acceptent de suspendre des surtaxes de 115 points de pourcentage qu’ils s’étaient imposées ces dernières semaines, dans le cadre d’une surenchère lancée en avril par un Donald Trump dénonçant une relation commerciale déséquilibrée en faveur de la Chine.
Les marchés rassurés
La nouvelle a aussitôt rassuré les marchés, Wall Street ouvrant en forte hausse, avec un Dow Jones prenant 2,66 %, le Nasdaq 4,16 % et le S&P 500 2,97 %, suivant la même tendance que les marchés asiatiques et européens.
« Nous avons réalisé une remise à zéro complète avec la Chine, après des discussions productives à Genève. Chacun a accepté de réduire les droits de douane imposés depuis le 2 avril à 10 % pour 90 jours et les négociations vont se poursuivre sur les aspects structurels plus larges », a déclaré lundi le président américain devant la presse.
Le total des droits de douane imposés par les États-Unis est en fait de 30 % car Washington n’a pas remis en question une surtaxe de 20 % mise en place avant le mois d’avril.
Donald Trump espère désormais discuter avec son homologue chinois Xi Jinping, « peut-être à la fin de la semaine ».
Si la trêve annoncée lundi n’est valable que pendant trois mois, il s’agit d’un premier signe concret d’apaisement dans cette guerre commerciale qui a fait tanguer les marchés financiers et alimenté des craintes d’inflation et de ralentissement économique aux États-Unis, en Chine et dans le reste du monde.
« Aucun camp ne veut une dissociation » des économies américaine et chinoise, a déclaré le secrétaire américain au Trésor, Scott Bessent, à Genève. Mais « nous voulons une (relation) commerciale plus équilibrée », a-t-il ajouté, estimant que les barrières douanières instaurées ces derniers mois avaient de facto mis en place un « embargo » sur les échanges entre les deux pays.
La réduction de ces droits de douane est « dans l’intérêt commun du monde », a commenté le ministère chinois du Commerce, saluant des « progrès substantiels » dans les négociations commerciales avec Washington.
« Travailler de façon constructive » sur la question du fentanyl
Cette trêve est le fruit de deux jours de négociations à Genève entre, côté américain, MM. Bessent et Greer, et, côté chinois, le vice-Premier ministre He Lifeng. Cette rencontre, qui s’est déroulée selon Scott Bessent dans un « grand respect », était la première en face-à-face de hauts responsables des deux pays depuis que le président Trump a imposé début avril une surtaxe de 145 % sur les marchandises venant de Chine, en plus des droits de douane préexistants.
Pékin avait riposté avec 125 % de droits de douane sur les produits américains.
Selon leur communiqué commun, les deux pays sont en outre convenus d' »établir un mécanisme pour poursuivre les discussions sur les relations commerciales et économiques ».
Dans un entretien avec la chaîne américaine CNBC lundi, Scott Bessent a évoqué une nouvelle réunion sino-américaine « dans les prochaines semaines pour travailler à un accord plus étoffé ». Il a notamment dit vouloir parler avec Pékin des restrictions autres que les droits de douane, appelées « barrières non tarifaires », qui empêchent selon lui les entreprises américaines de prospérer en Chine. Il s’agit traditionnellement de licences ou de quotas d’importation.
« En réalité, la Chine a des droits de douane peu élevés. Ce sont ces barrières non tarifaires, plus insidieuses, qui nuisent aux entreprises américaines qui veulent y faire des affaires », a déclaré le secrétaire au Trésor sur CNBC.
Selon le représentant américain au Commerce Jamieson Greer, Washington et Pékin vont également « travailler de façon constructive » sur la question du fentanyl, un puissant opioïde de synthèse qui fait des ravages aux États-Unis. Donald Trump a en partie justifié ses droits de douane contre la Chine en affirmant vouloir réduire la quantité de fentanyl arrivant aux États-Unis depuis ce pays.
« Encore des efforts à fournir pour parvenir à un accord formel »
L’annonce faite lundi « va au-delà de ce qu’attendaient les marchés », a souligné Zhiwei Zhang, président et économiste en chef de Pinpoint Asset Management, qui y voit un « bon point de départ pour que les deux pays négocient ».
« Du point de vue de la Chine, le résultat de ces négociations est un succès, car la Chine a adopté une position de fermeté face à la menace américaine de droits de douane élevés, et est parvenue à faire baisser drastiquement ces droits de douane sans faire de concessions », a-t-il relevé.
Mais si cette trêve constitue un « progrès important », « il y a encore des efforts à fournir pour parvenir à un accord formel » et la situation « pourrait se dégrader », a néanmoins mis en garde Daniela Sabin Hathorn, analyste de Capital.com.
La réunion à Genève a eu lieu deux jours après que M. Trump a dévoilé un accord commercial avec le Royaume-Uni, le premier conclu depuis qu’il a imposé des droits de douane plus ou moins prohibitifs à tous les pays.
Avec AFP