Ahmad Ahmad, président de la CAF : « je ne veux pas même pas parler du cas guinéen pour le moment… »
Le pays hôte de la Coupe d’Afrique des nations 2019 sera désigné le 9 janvier à Dakar, a annoncé le président de la Confédération africaine de football (CAF). Au micro de RFI, le Malgache Ahmad est par ailleurs revenu sur le souhait de la CAF d’organiser la CAN 2021 au Cameroun et celle de 2023 en Côte d’Ivoire.
RFI : Président Ahmad, les Camerounais étaient mécontents et ont semblé surpris lorsque vous avez annoncé qu’ils n’organiseraient pas la CAN 2019. Il semblerait depuis deux ou trois jours que le Cameroun, par la voix de Paul Biya lui-même, ait toutefois accepté d’abriter la CAN 2021. Confirmez-vous en avoir parlé avec le chef de l’Etat et qu’il soit enclin à aller vers 2021 ?
Ahmad : Il y a eu une préparation de cette prise de décision. […] Je sais que ma présence au Cameroun, avant les élections présidentielles, a intrigué beaucoup de personnes. Mais il faut faire comprendre aux gens qu’il y a une distinction à faire entre la personne, Ahmad, et le président de la CAF. Je dois diriger une institution sans tenir compte de ma personnalité. Je représente 54 pays africains et pas seulement Madagascar. Tout ça m’oblige évidemment à prendre beaucoup plus de précautions.
Les Camerounais sont donc d’accord pour organiser la CAN 2021 ?
Oui, ils sont d’accord, actuellement.
Les Ivoiriens sont-ils d’accord pour organiser la CAN 2023 plutôt que celle de 2021 ? Il y a eu de la cacophonie à ce sujet. La Fédération ivoirienne de football (FIF) et le ministre des Sports ont déclaré n’être au courant d’aucune discussion concernant un glissement. Confirmez-vous le fait que les autorités ivoiriennes étaient bien au courant ?
Tout ça m’étonne un peu… Ne pas remercier la Confédération africaine de football (CAF) d’avoir donné du temps. Surtout venant de la part des techniciens. Si ça avait été le chef de l’Etat, j’aurais pu facilement comprendre. Car, en politique, on n’est pas forcé de connaître et de comprendre les arcanes de l’organisation d’une grande compétition.
Ça démontre peut-être l’insuffisance des responsables qui, au lieu de convaincre leurs chefs que cette décision [accueillir la CAN deux ans plus tard, Ndlr] est une bonne chose, font de la politique politicienne afin de créer des polémiques.
Comment voulez-vous construire cinq stades [en Côte d’Ivoire pour la CAN 2021, Ndlr] en deux ans ? Il y a certaines villes censées abriter la CAN où il n’y a rien, pas d’hôtels notamment. Ces gens font croire à leurs chefs qu’un village comme celui qui a accueilli les athlètes des Jeux de la Francophonie peut être utilisé avec la CAF. Non, car le football, c’est autre chose. […]
Concernant la Guinée, qui avait été désignée pays-hôte de la CAN 2023, on ne sait plus trop où on en est. Va-t-on vers une CAN 2025 en Guinée ?
[Il coupe] Je ne veux même pas parler du cas guinéen, pour le moment… Laissez-moi tout d’abord gérer les deux autres. Après, on verra. D’abord, il faut faire glisser les deux autres CAN. Je suis sûr qu’on va y arriver. Je suis persuadé du fait que les grands responsables ivoiriens vont écouter leurs compatriotes qui gèrent la préparation de la CAN. Ils vont se rendre compte que c’est la CAF qui avait raison.
On ne peut pas appliquer bêtement les règlements, même pour le cas du Cameroun. Faire ce glissement d’une édition à l’autre est une faute de la CAF. C’est une entorse aux règlements. Mais nous ne pouvons pas faire autrement. On est dans une phase très compliquée. Si je me rappelle bien, l’article 92 du règlement de la CAN, prévoit dans un cas de retrait comme celui-ci [celui du Cameroun, Ndlr] une amende et une suspension pour deux éditions.
Vous allez donc contourner le règlement en ce qui concerne le Cameroun ?
Oui. Il faut être constructif. Le Comité exécutif a fait le règlement. Et s’il décide de changer ce règlement, c’est son droit. Comment pourrait-on laisser tomber le Cameroun et le sanctionner par rapport aux investissements qui ont été consentis ? En tant que responsables, nous ne pouvons pas faire ça. […] On se rend bien compte que ce n’est pas évident pour un pays africain d’investir dans la construction de telles installations. Donc, on ne peut pas « assassiner » la jeunesse camerounaise, la jeunesse africaine. Car, ce sont eux qui vont bénéficier des avantages.
Le Congo-Brazzaville est-il vraiment candidat à l’organisation de la CAN 2019 ? Le ministre des Sports congolais l’a démenti.
Je ne veux pas aller vers ces polémiques-là. Je laisse à la presse les investigations. La CAF a reçu des lettres, dont une de la part du Congo. Ils doivent se poser des questions entre eux : qui a envoyé cette lettre ? Qui a donné l’ordre de le faire ? […]
Je préfère évoquer le processus de désignation du pays-hôte de le CAN 2019. […] On a ouvert les candidatures du 5 au 14 décembre. Après ces manifestations de candidature, le cabinet d’audit Roland Berger va compléter l’étude de ces candidatures par des questionnaires ou par des visites de terrain. […]
Je sais, à travers mon bureau, qu’il y a eu des manifestations d’intérêt. Mais est-ce que ces pays vont aller jusqu’à envoyer des candidatures ? Sur ce point, on attend. […]
J’avais dit que le 25 décembre, on aurait la short-liste avec les évaluations et le classement des pays retenus. Au début, on s’était dit qu’on allait consulter les membres du Comité exécutif, le 26-27 décembre. Mais j’ai consulté quelques membres, puis je suis revenu vers le cabinet Roland Berger pour leur dire qu’ils avaient plus de temps. Car nous avons décidé de nous réunir en session extraordinaire le 9 janvier […] à Dakar, au lendemain des Trophées de la CAF. On va se réunir ce matin-là. Roland Berger va nous exposer son dossier. A nous, alors, de voter ou de choisir le pays organisateur de la CAN 2019, ce jour-là.
Propos recueillis par Olivier Pron et retranscrits par rfi.fr